
Le manganèse tire son nom de la magnésie noire, un minerai d'oxyde de manganèse connu depuis l'Antiquité pour sa capacité à décolorer le verre ou à lui donner une teinte violette. En 1774, le chimiste suédois Johan Gottlieb Gahn (1745-1818) isole pour la première fois le manganèse métallique en réduisant le dioxyde de manganèse avec du carbone. Cette découverte fait suite aux travaux de Carl Wilhelm Scheele (1742-1786), qui avait démontré quelques années auparavant que la pyrolusite contenait un nouvel élément. Scheele avait identifié cet élément en 1774, mais c'est Gahn qui réussit à l'isoler sous forme métallique la même année. Le nom "manganèse" provient du latin magnes, en référence aux propriétés magnétiques de certains de ses composés, bien que le métal pur ne soit pas magnétique.
Le manganèse (symbole Mn, numéro atomique 25) est un métal de transition du groupe 7 du tableau périodique. Son atome possède 25 protons, généralement 30 neutrons (pour l'isotope stable \(\,^{55}\mathrm{Mn}\)) et 25 électrons avec la configuration électronique [Ar] 3d⁵ 4s².
À température ambiante, le manganèse est un métal solide gris argenté, relativement dur et cassant (densité ≈ 7.21 g/cm³). Il existe sous plusieurs formes allotropiques, la forme alpha étant la plus stable à température ordinaire. Le manganèse s'oxyde lentement à l'air et se dissout facilement dans les acides dilués. Le point de fusion (état liquide) du manganèse : 1 519 K (1 246 °C). Le point d'ébullition (état gazeux) du manganèse : 2 334 K (2 061 °C).
| Isotope / Notation | Protons (Z) | Neutrons (N) | Masse atomique (u) | Abondance naturelle | Demi-vie / Stabilité | Décroissance / Remarques |
|---|---|---|---|---|---|---|
| Manganèse-55 — \(\,^{55}\mathrm{Mn}\,\) | 25 | 30 | 54.938044 u | 100 % | Stable | Seul isotope stable du manganèse, présent dans toute la nature. |
| Manganèse-53 — \(\,^{53}\mathrm{Mn}\,\) | 25 | 28 | 52.941290 u | Trace cosmogénique | ≈ 3.7 millions d'années | Radioactif, capture électronique vers \(\,^{53}\mathrm{Cr}\). Utilisé pour dater les nodules de manganèse océaniques. |
| Manganèse-54 — \(\,^{54}\mathrm{Mn}\,\) | 25 | 29 | 53.940359 u | Artificiel | ≈ 312.2 jours | Radioactif, capture électronique vers \(\,^{54}\mathrm{Cr}\). Produit dans les réacteurs nucléaires, utilisé comme traceur. |
| Manganèse-52 — \(\,^{52}\mathrm{Mn}\,\) | 25 | 27 | 51.945565 u | Artificiel | ≈ 5.6 jours | Radioactif, émetteur de positons. Utilisé en imagerie médicale TEP. |
| Manganèse-56 — \(\,^{56}\mathrm{Mn}\,\) | 25 | 31 | 55.938905 u | Artificiel | ≈ 2.6 heures | Radioactif, décroissance bêta moins vers \(\,^{56}\mathrm{Fe}\). Produit par activation neutronique. |
N.B. :
Les couches électroniques : Comment les électrons s'organisent autour du noyau.
Le manganèse possède 25 électrons répartis sur quatre couches électroniques. Sa configuration électronique complète est : 1s² 2s² 2p⁶ 3s² 3p⁶ 3d⁵ 4s², ou de manière simplifiée : [Ar] 3d⁵ 4s². Cette configuration peut aussi s'écrire : K(2) L(8) M(13) N(2).
Couche K (n=1) : contient 2 électrons dans la sous-couche 1s. Cette couche interne est complète et très stable.
Couche L (n=2) : contient 8 électrons répartis en 2s² 2p⁶. Cette couche est également complète, formant une configuration de gaz noble (néon).
Couche M (n=3) : contient 13 électrons répartis en 3s² 3p⁶ 3d⁵. Les orbitales 3s et 3p sont complètes, tandis que les orbitales 3d sont à demi-remplies avec 5 électrons, une configuration particulièrement stable.
Couche N (n=4) : contient 2 électrons dans la sous-couche 4s. Ces électrons sont les premiers à être impliqués dans les liaisons chimiques.
Les 7 électrons des couches externes (3d⁵ 4s²) constituent les électrons de valence du manganèse. Cette configuration explique ses propriétés chimiques variées :
Le manganèse peut adopter de nombreux états d'oxydation, de +2 à +7, ce qui en fait l'un des éléments les plus polyvalents.
L'état d'oxydation +2 (Mn²⁺) est le plus courant et le plus stable en solution aqueuse.
L'état +4 est présent dans le dioxyde de manganèse (MnO₂), un composé très important industriellement.
L'état +7 existe dans le permanganate (MnO₄⁻), un puissant agent oxydant de couleur violette intense.
La configuration 3d⁵ à demi-remplie confère une stabilité particulière à l'ion Mn²⁺. Cette structure électronique explique également pourquoi le manganèse forme des composés aux couleurs variées selon son degré d'oxydation : rose pâle pour Mn²⁺, brun foncé pour MnO₂, vert pour Mn⁶⁺, violet pour MnO₄⁻.
Le manganèse est un métal modérément réactif. Il s'oxyde lentement à l'air humide et plus rapidement à température élevée, formant divers oxydes. Il réagit avec l'eau chaude pour libérer de l'hydrogène et se dissout facilement dans les acides dilués en produisant du dihydrogène. Le manganèse peut réagir avec les halogènes, le soufre, l'azote et le carbone à haute température. Ses composés présentent une grande variété d'états d'oxydation, du +2 au +7, ce qui en fait un élément chimiquement très polyvalent. Le dioxyde de manganèse (MnO₂) agit comme un catalyseur dans de nombreuses réactions, notamment la décomposition du peroxyde d'hydrogène. Le permanganate de potassium (KMnO₄) est un oxydant puissant largement utilisé en chimie analytique et dans le traitement de l'eau.
Le manganèse est un oligo-élément essentiel pour tous les organismes vivants. Il joue un rôle crucial comme cofacteur enzymatique dans de nombreuses réactions biochimiques. Chez les plantes, le manganèse est indispensable à la photosynthèse, participant directement à la photolyse de l'eau dans le photosystème II. Chez les animaux et les humains, il est nécessaire au métabolisme des glucides, des acides aminés et du cholestérol. Le manganèse active plusieurs enzymes importantes, notamment la superoxyde dismutase mitochondriale (SOD2), qui protège les cellules contre les dommages oxydatifs. Il participe également à la formation osseuse, à la coagulation sanguine et au fonctionnement du système nerveux. Une carence en manganèse peut entraîner des troubles de la croissance, des anomalies osseuses et des problèmes reproductifs, bien que ces carences soient rares chez l'homme.
Le manganèse est produit principalement lors de la nucléosynthèse explosive qui se produit pendant les supernovae de type Ia et les supernovae à effondrement de cœur. Il se forme par capture de neutrons et par des réactions nucléaires impliquant le fer et le chrome dans les couches externes de l'étoile en explosion. L'isotope radioactif \(\,^{53}\mathrm{Mn}\) (demi-vie de 3.7 millions d'années) est particulièrement intéressant car il permet d'étudier les processus d'enrichissement chimique du système solaire primitif. Sa présence dans les météorites anciennes fournit des informations sur le timing de la formation des premiers corps solides du système solaire.
Les raies spectrales du manganèse (Mn I, Mn II) sont utilisées en spectroscopie stellaire pour déterminer la composition chimique des étoiles et tracer l'évolution chimique des galaxies. Le rapport manganèse/fer dans les étoiles anciennes aide les astronomes à comprendre les contributions relatives des différents types de supernovae à l'enrichissement chimique de l'Univers. Les nodules de manganèse découverts sur les fonds océaniques terrestres contiennent également du \(\,^{53}\mathrm{Mn}\) cosmogénique, permettant de les dater et d'étudier les processus géologiques sur de longues échelles de temps.
N.B. :
Le manganèse est le douzième élément le plus abondant dans la croûte terrestre (environ 0.1 % en masse). Il se présente principalement dans des minerais comme la pyrolusite (MnO₂), la rhodochrosite (MnCO₃) et la braunite (Mn₂O₃). Les plus grands gisements se trouvent en Afrique du Sud, en Australie, en Chine et au Gabon. Les nodules polymétalliques des fonds océaniques contiennent également d'importantes quantités de manganèse et représentent une ressource potentielle pour l'avenir. L'extraction et le traitement du manganèse sont relativement simples comparés à d'autres métaux, ce qui explique son utilisation massive dans l'industrie sidérurgique mondiale.