L'indium fut découvert en 1863 par les chimistes allemands Ferdinand Reich (1799-1882) et Hieronymus Theodor Richter (1824-1898) à l'École des mines de Freiberg, en Saxe. Reich recherchait du thallium dans des minerais de zinc de la région, en utilisant la spectroscopie, technique alors révolutionnaire développée par Bunsen et Kirchhoff quelques années auparavant.
Reich, qui était daltonien, demanda à son assistant Richter d'observer le spectre d'émission d'un échantillon purifié. Richter observa deux raies bleues intenses et caractéristiques qui ne correspondaient à aucun élément connu. Reich et Richter reconnurent qu'ils avaient découvert un nouvel élément, qu'ils nommèrent indium du latin indicum signifiant indigo, en référence à la couleur bleu indigo des raies spectrales qui avaient révélé son existence.
L'isolement de l'indium métallique pur en quantité suffisante pour en étudier les propriétés prit plusieurs années. Richter réussit finalement à produire du métal relativement pur en 1867. L'indium demeura une curiosité de laboratoire pendant près d'un siècle, sans applications pratiques significatives jusqu'au développement de l'électronique moderne dans les années 1940-1950.
L'indium (symbole In, numéro atomique 49) est un métal post-transition du groupe 13 de la classification périodique, avec l'aluminium, le gallium et le thallium. Son atome possède 49 protons, généralement 66 neutrons (pour l'isotope le plus abondant \(\,^{115}\mathrm{In}\)) et 49 électrons avec la configuration électronique [Kr] 4d¹⁰ 5s² 5p¹.
L'indium est un métal blanc argenté brillant, extrêmement mou et malléable. Il possède une densité de 7,31 g/cm³, le rendant modérément lourd. L'indium est si mou qu'il peut être rayé avec l'ongle et marque le papier comme un crayon. Il cristallise dans une structure tétragonale centrée, structure inhabituelle pour un métal. L'indium émet un cri caractéristique (cry) lorsqu'il est plié, dû à la friction des cristaux se réorientant.
L'indium fond à 157 °C (430 K), un point de fusion très bas qui le rend liquide légèrement au-dessus de la température d'ébullition de l'eau. Il bout à 2072 °C (2345 K). L'indium liquide mouille remarquablement bien le verre, propriété exploitée pour créer des revêtements minces uniformes et des scellements hermétiques verre-métal.
L'indium possède une résistance exceptionnelle à la corrosion atmosphérique, ne ternissant pratiquement pas à l'air. Il est stable à température ambiante dans l'eau, les bases et la plupart des acides dilués. Cette stabilité chimique, combinée à sa capacité à former des alliages à bas point de fusion et à adhérer au verre, en fait un matériau précieux pour diverses applications technologiques.
Le point de fusion de l'indium : 430 K (157 °C).
Le point d'ébullition de l'indium : 2345 K (2072 °C).
L'indium est le métal le plus mou après le sodium, le lithium et le plomb.
| Isotope / Notation | Protons (Z) | Neutrons (N) | Masse atomique (u) | Abondance naturelle | Demi-vie / Stabilité | Désintégration / Remarques |
|---|---|---|---|---|---|---|
| Indium-113 — \(\,^{113}\mathrm{In}\,\) | 49 | 64 | 112,904058 u | ≈ 4,29 % | Stable | Seul isotope stable de l'indium, minoritaire dans l'indium naturel. |
| Indium-115 — \(\,^{115}\mathrm{In}\,\) | 49 | 66 | 114,903878 u | ≈ 95,71 % | ≈ 4,41 × 10¹⁴ ans | Radioactif (β⁻). Demi-vie extrêmement longue (31 000 fois l'âge de l'univers), considéré comme quasi-stable. |
| Indium-111 — \(\,^{111}\mathrm{In}\,\) | 49 | 62 | 110,905103 u | Synthétique | ≈ 2,80 jours | Radioactif (capture électronique). Émetteur gamma utilisé en imagerie médicale SPECT et scintigraphie. |
| Indium-114m — \(\,^{114m}\mathrm{In}\,\) | 49 | 65 | 113,904917 u | Synthétique | ≈ 49,5 jours | Radioactif (transition isomérique, β⁻). État métastable utilisé comme traceur industriel. |
N.B. :
Couches électroniques : Comment les électrons sont organisés autour du noyau.
L'indium possède 49 électrons répartis sur cinq couches électroniques. Sa configuration électronique complète est : 1s² 2s² 2p⁶ 3s² 3p⁶ 3d¹⁰ 4s² 4p⁶ 4d¹⁰ 5s² 5p¹, ou de manière simplifiée : [Kr] 4d¹⁰ 5s² 5p¹. Cette configuration peut également s'écrire : K(2) L(8) M(18) N(18) O(3).
Couche K (n=1) : contient 2 électrons dans la sous-couche 1s. Cette couche interne est complète et très stable.
Couche L (n=2) : contient 8 électrons répartis en 2s² 2p⁶. Cette couche est également complète, formant une configuration de gaz noble (néon).
Couche M (n=3) : contient 18 électrons répartis en 3s² 3p⁶ 3d¹⁰. Cette couche complète contribue à l'écran électronique.
Couche N (n=4) : contient 18 électrons répartis en 4s² 4p⁶ 4d¹⁰. La sous-couche 4d complète est particulièrement stable.
Couche O (n=5) : contient 3 électrons répartis en 5s² 5p¹. Ces trois électrons sont les électrons de valence de l'indium.
L'indium possède 3 électrons de valence : deux électrons 5s² et un électron 5p¹. L'état d'oxydation le plus courant est +3, où l'indium perd ses trois électrons de valence pour former l'ion In³⁺ avec la configuration [Kr] 4d¹⁰. Cet état apparaît dans la plupart des composés d'indium : oxyde d'indium(III) (In₂O₃), chlorure d'indium(III) (InCl₃), et l'oxyde d'étain-indium (ITO).
L'état d'oxydation +1 existe également et devient plus stable à mesure qu'on descend dans le groupe 13, en raison de l'effet de paire inerte (les électrons 5s² restent appariés et ne participent pas aux liaisons). Des composés comme le chlorure d'indium(I) (InCl) et l'oxyde d'indium(I) (In₂O) existent mais sont moins stables que leurs homologues d'indium(III). L'indium métallique correspond à l'état d'oxydation 0.
L'indium est remarquablement stable à l'air à température ambiante, ne s'oxydant que très lentement. Une fine couche d'oxyde transparente se forme à la surface, protégeant le métal de l'oxydation ultérieure. À haute température (au-dessus de 800 °C), l'indium brûle dans l'air avec une flamme bleu-violet caractéristique, formant de l'oxyde d'indium(III) : 4In + 3O₂ → 2In₂O₃.
L'indium réagit lentement avec les acides dilués pour former des sels d'indium(III) : 2In + 6HCl → 2InCl₃ + 3H₂. Il se dissout plus rapidement dans les acides oxydants concentrés. L'indium réagit avec les halogènes à température élevée pour former des trihalogénures : 2In + 3X₂ → 2InX₃. Il réagit également avec le soufre, le sélénium et le tellure pour former des chalcogénures.
L'indium forme de nombreux alliages à bas point de fusion avec d'autres métaux. Les alliages indium-étain, indium-plomb, et indium-bismuth ont des points de fusion inférieurs à 100 °C et sont utilisés comme soudures, joints hermétiques, et fusibles de sécurité. L'indium adhère excellemment au verre et à de nombreux autres matériaux, propriété exploitée pour les scellements verre-métal et les revêtements.
L'application dominante de l'indium, représentant environ 70% de la demande mondiale, est l'oxyde d'étain-indium (ITO : Indium Tin Oxide), composé d'environ 90% In₂O₃ et 10% SnO₂. L'ITO possède une combinaison unique de propriétés : transparence optique exceptionnelle dans le visible (transmittance > 90%) et conductivité électrique élevée, faisant de lui un conducteur transparent idéal.
Chaque écran tactile de smartphone, tablette, ordinateur portable et écran plat contient une fine couche d'ITO (typiquement 100-300 nm d'épaisseur) déposée sur le verre ou le plastique. Cette couche transparente conduit l'électricité, permettant la détection des touches tactiles capacitives. Un smartphone typique contient environ 30-50 mg d'indium, un écran d'ordinateur portable 200-300 mg, et un téléviseur grand format jusqu'à 1-2 grammes.
L'explosion de l'électronique grand public dans les années 2000-2010 a créé une demande insatiable d'indium. La production mondiale d'indium a triplé entre 2000 et 2010, passant de 250 à plus de 750 tonnes par an. Cette demande massive, combinée à la rareté naturelle de l'indium, a provoqué des inquiétudes sur la sécurité d'approvisionnement et stimulé la recherche d'alternatives (graphène, nanotubes de carbone, nanofils d'argent) et l'amélioration du recyclage.
L'indium joue un rôle crucial dans plusieurs technologies d'énergie renouvelable. Les cellules solaires à couches minces CIGS (cuivre-indium-gallium-sélénium) offrent des efficacités de conversion élevées (jusqu'à 23% en laboratoire) avec une consommation de matériaux beaucoup plus faible que les cellules au silicium cristallin. Une cellule CIGS typique contient environ 5-10 mg d'indium par watt de puissance.
Les LED blanches, essentielles pour l'éclairage économe en énergie qui remplace progressivement les ampoules incandescentes et fluorescentes, utilisent des semi-conducteurs nitrure d'indium-gallium (InGaN) pour générer de la lumière bleue. La longueur d'onde d'émission peut être ajustée précisément en modifiant la proportion indium/gallium, permettant de créer des LED de différentes couleurs.
Cette dépendance des technologies vertes à l'indium crée un paradoxe : la transition énergétique vers les renouvelables et l'efficacité énergétique nécessite des quantités massives d'un métal extrêmement rare. La production mondiale d'indium (environ 800-900 tonnes/an) est minuscule comparée aux besoins potentiels si ces technologies se généralisent. Le recyclage de l'indium devient donc une priorité stratégique.
L'indium est synthétisé dans les étoiles principalement par le processus s (capture lente de neutrons) dans les étoiles de la branche asymptotique des géantes (AGB), avec des contributions du processus r (capture rapide de neutrons) lors de supernovae et de fusions d'étoiles à neutrons. L'indium-115, isotope dominant quasi-stable, est principalement produit par le processus s.
L'abondance cosmique de l'indium est d'environ 1,8×10⁻¹⁰ fois celle de l'hydrogène en nombre d'atomes, ce qui en fait l'un des éléments relativement rares de l'univers. Cette rareté reflète sa position au-delà du pic de fer dans la courbe de stabilité nucléaire.
L'indium-115, bien que radioactif avec une demi-vie de 441 trillions d'années (environ 31 000 fois l'âge de l'univers), est considéré comme quasi-stable à l'échelle humaine et même cosmique. Cette radioactivité extrêmement lente se manifeste par désintégration β⁻ en étain-115 stable. La demi-vie exceptionnellement longue rend l'indium-115 inutilisable pour la datation radiométrique mais fait de lui un exemple fascinant de noyau métastable.
Les raies spectrales de l'indium neutre (In I) et ionisé (In II) sont difficiles à observer dans les spectres stellaires en raison de sa faible abondance cosmique. Néanmoins, des raies d'indium ont été détectées dans quelques étoiles enrichies en éléments du processus s, permettant d'étudier la nucléosynthèse dans les étoiles AGB.
N.B. :
L'indium est présent dans la croûte terrestre à une concentration moyenne d'environ 0,05 ppm, le rendant environ aussi rare que l'argent mais 3 fois plus rare que le mercure. L'indium ne forme pas de minerais propres économiquement exploitables mais se trouve toujours associé au zinc, au plomb, au cuivre et à l'étain dans leurs minerais, avec des concentrations typiques de 0,1 à 100 ppm (parties par million).
La production mondiale d'indium est d'environ 800-900 tonnes par an, entièrement comme sous-produit du raffinage du zinc (environ 70%), du plomb-zinc (20%) et de l'étain (10%). La Chine domine massivement la production avec environ 55% du total mondial, suivie par la Corée du Sud (25%), le Japon (10%) et le Canada. L'indium est récupéré des poussières, résidus et boues du raffinage électrolytique du zinc.
Le recyclage de l'indium est crucial en raison de sa rareté et de la concentration de la production. Actuellement, environ 25-30% de l'offre provient du recyclage, principalement de la récupération d'ITO dans les dalles d'écrans LCD en fin de vie et les chutes de production. Le taux de recyclage devrait augmenter significativement dans les prochaines décennies avec l'amélioration des technologies de récupération et l'augmentation du volume de déchets électroniques. L'indium est considéré comme un matériau critique par l'Union européenne, les États-Unis et d'autres économies majeures.