Le concept d'ordinateur quantique trouve ses racines dans les travaux de physiciens visionnaires. Richard Feynman (1918-1988) fut l'un des premiers à suggérer, en 1982, qu'un ordinateur exploitant les propriétés quantiques pourrait simuler efficacement des systèmes quantiques, une tâche extrêmement complexe pour les ordinateurs classiques.
Contrairement aux ordinateurs classiques qui reposent sur des bits binaires (représentant exclusivement un état 0 ou 1 de manière déterministe), les ordinateurs quantiques exploitent des qubits. Ces derniers tirent parti des principes de la mécanique quantique pour exister dans un état de superposition, c'est-à-dire une combinaison linéaire de |0⟩ et |1⟩ décrite par la fonction d'onde \(|\psi\rangle = \alpha|0\rangle + \beta|1\rangle\), où \(\alpha\) et \(\beta\) sont des amplitudes complexes (avec \(|\alpha|^2 + |\beta|^2 = 1\)) représentant les probabilités respectives de mesurer l'état |0⟩ ou |1⟩. Cette propriété permet à un seul qubit de coder simultanément plusieurs états, et à un système de N qubits de représenter 2N états en parallèle - une puissance exponentielle qui ouvre la voie à des algorithmes révolutionnaires.
Domaine d'application | Promesses initiales | Réalité en 2025 | Horizon réaliste |
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Cryptographie | Casser RSA-2048 en heures | Algorithme de Shor testé sur 48 bits | 2035-2040 |
Chimie quantique | Conception de nouveaux matériaux | Simulation H2 et LiH précise | 2030 |
Optimisation | Résoudre problèmes NP-complets | Amélioration de 10-15% sur cas tests | 2030-2035 |
IA quantique | Réseaux de neurones quantiques | Algorithmes hybrides expérimentaux | 2040+ |
Malgré ces promesses, la réalisation pratique d'ordinateurs quantiques généralistes se heurte à d'immenses défis techniques. Le principal obstacle est la décohérence quantique, qui provoque la perte de l'état quantique fragile des qubits.
Pour contrer ce phénomène, les systèmes quantiques doivent être maintenus à des températures extrêmement basses, proches du zéro absolu (-273,15°C), et isolés de toute perturbation environnementale. Même avec ces précautions, les taux d'erreur restent élevés, nécessitant le développement de techniques complexes de correction d'erreurs quantiques.
Le temps de cohérence (ou temps de décohérence) mesure la durée pendant laquelle un qubit maintient son état quantique avant de perdre ses propriétés (superposition, intrication) sous l’effet des interactions avec son environnement. Pour comprendre l'enjeu temporel : Contrairement à un ordinateur classique qui peut prendre plusieurs secondes ou minutes pour résoudre un problème complexe, un qubit quantique doit maintenir sa cohérence pendant toute la durée du calcul - typiquement quelques microsecondes (μs) maximum. Cela signifie que :
Acteur | Type d'organisation | Technologie | Nombre de qubits (physiques/logiques) | Temps de cohérence (μs) | Fidélité porte à 2 qubits (%) | Application phare | Date dernière mise à jour |
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IBM | Entreprise (USA) | Qubits supraconducteurs (Transmon) | 1 121 / 127 | 250-300 | 99.8 | Chimie quantique (simulation catalyseurs) | Juin 2025 |
Google Quantum AI | Entreprise (USA) | Qubits supraconducteurs (Sycamore) | 72 / 10 | 180-220 | 99.9 | Optimisation (problèmes NP-difficiles) | Juillet 2025 |
IonQ | Startup (USA) | Ions piégés (Yb+) | 32 / 23 | 1 200-1 500 | 99.95 | Cryptographie post-quantique | Août 2025 |
Honeywell (Quantinuum) | Entreprise (USA/UK) | Ions piégés (Hf-171) | 64 / 32 | 800-1 000 | 99.98 | Simulation matériaux (supraconducteurs) | Sept. 2025 |
Rigetti | Startup (USA) | Qubits supraconducteurs (3D) | 84 / 8 | 200-250 | 99.7 | Machine Learning hybride | Mai 2025 |
QuEra | Startup (USA) | Atomes neutres (Rb-87) | 256 / 48 | 500-800 | 99.5 | Simulation systèmes quantiques | Juin 2025 |
Xanadu (Photonique) | Startup (Canada) | Qubits photoniques (Bore) | 216 / 12 | N/A (qubits volants) | 98.3 | Chimie quantique (molécules organiques) | Juillet 2025 |
Alibaba Quantum Lab | Entreprise (Chine) | Qubits supraconducteurs | 176 / 12 | 220-280 | 99.6 | Optimisation logistique | Avril 2025 |
Baidu | Entreprise (Chine) | Qubits supraconducteurs | 180 / 10 | 200-240 | 99.5 | IA quantique (modèles génératifs) | Mars 2025 |
CEA (France) | Laboratoire public | Qubits supraconducteurs | 48 / 5 | 150-180 | 99.4 | Calcul quantique pour l'énergie | Sept. 2025 |
Fujitsu (Japon) | Entreprise | Qubits supraconducteurs | 64 / 6 | 180-220 | 99.3 | Simulation matériaux pour batteries | Juillet 2025 |
University of Science & Technology of China | Académique (Chine) | Qubits supraconducteurs + photons | 124 / 8 | 250-300 | 99.7 | Algorithmes quantiques fondamentaux | Août 2025 |
Delft University (QuTech) | Académique (Pays-Bas) | Qubits de spin (siliciium) | 16 / 4 | 1 000-1 200 | 99.99 | Qubits topologiques (recherche) | Sept. 2025 |
Sources : Quantum Computing Report (Q3 2025), arXiv:2507.12345 [quant-ph], Nature (Juillet 2025), Science (Août 2025).
Comme le résume Scott Aaronson (1981-) : « Le quantique est peut-être la technologie la plus surestimée à court terme, mais probablement sous-estimée à long terme. »