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L'espace dans le temps

Histoire d'espace

Mise à jour 04 octobre 2015

Il existe des dizaines de définitions de l'espace en fonction du contexte dans lequel ce mot est employé, mais aucune n'est satisfaisante pour décrire la nature même de l'espace.
La notion d'espace a évolué dans le temps, le concept est lié à l'histoire des mathématiques et de la physique. Pendant plusieurs millénaires, intuitif et familier, ce concept a été élargi au point de devenir extrêmement complexe.
Comment a évolué la notion d'espace dans le temps jusqu'à aujourd'hui ?
Pour les populations primitives, la notion d'espace n'existe pas, d'après les ethnologues, le centre du monde est le centre du village.
Dans la Grèce antique, celle de Périclès (vers −495) l'espace est une étendue limitée occupée par les corps. A l'époque de Platon (−428 −348) nait la philosophie et la science, et la notion d'espace est celle du vide, le réceptacle dans lequel tout existe (le Timée de Platon). Pour Aristote (−384 −322), l'espace est la somme des lieux.
La première notion classique formalisée de l'espace, se dégage avec la géométrie d'Euclide (vers −300). L'espace est "géométrisé".
Pendant l'âge d'or islamique (≈750 à ≈1250) et jusqu'à la fin du moyen âge, la notion d'espace est celle d'Euclide. L'âge d'or islamique a commencé avec la traduction des œuvres scientifiques d’origines grecque, indienne, persane et syriaque, en arabe.
Pendant la renaissance, l'espace devient plus abstrait, il est modifié par les peintres qui tracent sur leurs tableaux des projections sur un plan, la géométrie projective apparait.
Au 17è siècle arrive la révolution newtonienne qui marque le début de la science moderne.

Newton énonce les propriétés d'un espace physique et d'un temps physique. Dès lors, tous les phénomènes vont se dérouler dans un espace immuable, absolu, et dans un temps qui s'écoule toujours dans le même sens.
Aujourd'hui dans les trous noirs, l'espace et le temps se confondent.
L'espace a évolué d'une conception philosophique à un concept mathématique et physique.
Actuellement, l'espace fait référence à la géométrie, le temps, lui-même géométrisé, est la quatrième dimension de l'espace. Le temps représenté comme la succession continue des instants sur une droite, est un espace à une dimension.
La théorie de la relativité restreinte d'Einstein regroupe ces deux entités comme étant l'espace-temps, un espace à quatre dimensions.
Dans la géométrie d'Euclide les objets sont idéalisés. Le point, la droite, le polyèdre, les sections coniques et leurs mesures que sont la longueur, l'aire, le volume, apparaissent dans un espace intuitif.
Aujourd'hui la droite euclidienne est devenue une variété mathématique à une dimension, le plan une variété à deux dimensions, l'espace euclidien, une variété à trois dimensions. Ces trois variétés font partie des autres variétés mathématiques à n dimensions.
Ce sont les géomètres du 19è siècle comme Carl Friedrich Gauss (1777 − 1855), Bernhard Riemann (1826 − 1866), János Bolyai (1802 − 1860), Jean-Henri Lambert (1728 − 1777), qui ont montré qu'à côté de cet espace euclidien, il existait d'autres espaces à n dimensions.
A cette époque une propriété supplémentaire est attribuée à l'espace.

L'espace dans le temps

Image : La flagellation du Christ de Piero Della Francesca (entre 1444 et 1478). L'œuvre de Piero Della Francesca, maitre de la perspective et de la géométrie euclidienne, reproduit aussi parfaitement que possible l'espace capté par l'œil humain. Dès le début de la renaissance l'espace devient plus abstrait, on peut le voir de l'extérieur.
La géométrie synthétique d'Euclide pose alors un problème, en particulier, l'axiome des parallèles (cinquième postulat d’Euclide).

L'espace est courbe

A la fin du 19è siècle, les développements des mathématiques vont conduire à redéfinir la notion d'espace.
L'espace a maintenant une courbure, nulle, positive ou négative qui peut varier d'un point à un autre de l'espace. Par exemple, la droite et le plan ont une courbure constante égale à zéro, la sphère a une courbure constante qui vaut 1/R2, en d'autres termes la courbure de la sphère est d'autant plus grande que son rayon est petit.
Mais la courbure ne se décrit pas simplement comme un nombre mais par un tenseur, un objet mathématique complexe qui peut varier d'un endroit à un autre de l'espace.
Les surfaces bosselées ont à chaque point une courbure comme la surface d'un océan où à chaque endroit il y a une courbure différente.
Au 20è siècle Einstein ajoute le temps à l'espace.
La notion d'espace-temps a été introduite par Hermann Minkowski (1864 − 1909) en 1908 dans un exposé mathématique sur la géométrie de l'espace et du temps telle qu'elle avait été définie par la théorie de la relativité restreinte d'Albert Einstein (1877 - 1953).
L'espace-temps est une variété à 4 dimensions qui a une courbure variable d'un endroit à l'autre. Cette courbure, c'est la gravitation. Tous les objets de l'espace ressentent cette courbure. "Ainsi entre la terre et la lune il y a de la géométrie".
La géométrie différentielle de Bernhard Riemann (1826 - 1866) va ouvrir la voie aux géométries non euclidiennes, ce qui va permettre à Einstein d'élaborer la théorie de la Relativité Générale qui identifie les effets gravitationnels sur la courbure de l'espace. Dès lors, la topologie globale de l'espace va faire l'objet de nombreuses recherches. Les mathématiciens vont encore complexifier la notion d'espace. L'espace possède maintenant n dimensions, de plus il est multiple, chaque espace appartient à une classe d'espace et la courbure existe dans tous les espaces.

L'autre innovation de l'espace est exprimée par la géométrie non commutative développée par Alain Connes en 1985. Dans un espace non commutatif, la notion de point disparait, la nature même de l'espace interdit de localiser une particule. Avec la mécanique quantique, un système microscopique, un atome par exemple, a des coordonnées, comme la position, qui ne commutent plus. Dans ces espaces, l’algèbre des coordonnées n’obéit plus à la règle de commutativité (x + y = y + x).
Lorsqu'on veut savoir où se situe une particule on aboutit à une relation d'incertitude. La position de la particule ne peut pas être située dans l'espace avec précision.
En 1924, Louis Victor De Broglie (1892 - 1987) affirme que toute matière est dotée d'une onde associée. L'espace de la particule dépend de la température, c'est la fameuse longueur d'onde de De Broglie.
Puis viennent les espaces fibrés et le concept de voisinage, de projection et de connexion.
C'est un espace séparé (fibre) qui s'appuie sur un autre espace (base) où chaque point de la base admet un voisin, le tout relié par un ensemble de "cartes" qui commutent. La représentation n'est absolument pas intuitive. Un type d'espace fibré est donné par le ruban de Möbius (voir image).
Depuis 2500 ans, on a élargi la notion d'espace à la géométrie d'Euclide, aux variétés non euclidiennes, à la géométrie non commutative collant à la physique quantique, puis aux espaces fibrés collant à la physique quantique des champs, mais les scientifiques n'ont pas encore trouvé une théorie unifiée de l'espace et du temps qui fonctionne dans les deux univers, celui du monde subatomique et celui du monde macroscopique.
Il est bien possible que les notions d'espace et de temps n'existent pas mais apparaissent seulement quand notre regard interprète le monde qui nous entoure.

ruban de Möbius

Image : Il est facile de visualiser le ruban de Möbius dans l'espace. C'est un modèle simple à réaliser, il suffit de faire une torsion à une bande de papier, puis de coller ses deux extrémités. Et là on peut voir que le ruban n'a plus qu'une seule face contrairement à un ruban classique qui en a deux. Le ruban de Möbius muni de la projection sur un cercle médiateur est un espace fibré. C'est un exemple simple de variété abstraite mais au delà de 2 dimensions cela n'est plus représentable. Ainsi la bouteille de Klein, qui est une surface fermée sans bord et non orientable dans un espace à 3 dimensions, n'a ni « intérieur » ni « extérieur ».
crédit : GNU Free Documentation License

La longueur d'onde de de Broglie est un concept de la mécanique quantique.
C'est une grandeur qui représente la longueur d'onde thermique caractérisant l'étalement spatial d'une particule.

λ = h/(mv)
h est la constante de Planck
m est la masse de la particule
v est la vitesse

Quand on refroidit un gaz, on diminue l'agitation atomique donc la vitesse des atomes, la nature ondulatoire entre en jeu.
Quand la vitesse diminue la longueur d'onde de de Broglie augmente, donc les paquets d'ondes associés à chaque particule, deviennent de plus en plus "gros", la longueur d'onde s'étale de plus en plus.
En d'autres termes, basse température = petite vitesse donc grande longueur d'onde de De Broglie donc grand étalement spatial de la particule.
L'espace-temps est une variété mathématique à 4 dimensions, 3 dimensions spatiales et une dimension temporelle, le temps est géométrisé, il s'écoule sur une droite, c'est la quatrième dimension de l'espace.
De plus, l'espace-temps a une propriété qui est la courbure et elle est variable d'un endroit à l'autre et chaque point de l'espace a un rayon de courbure.
Cette courbure, c'est la gravitation.
Ainsi, tous les objets de l'espace ressentent la courbure de l'espace-temps.
Un tenseur est un objet mathématique abstrait extrêmement complexe qui possède un nombre arbitraire d'indices inférieurs et d'indices supérieurs.
Par rapport au tenseur, la matrice n'est qu'un simple tableau de nombres, alors que le tenseur est comme les vecteurs, un objet abstrait dont les coordonnées changent lorsqu'on passe d'une représentation dans une base donnée à une représentation dans une autre base.
Par exemple, en géométrie différentielle, le tenseur permet d'exprimer la courbure. Dans un espace courbe, les parallèles ne sont pas nécessairement conservées. Plus l'espace est courbe, plus les géodésiques vont se rapprocher ou s'éloigner rapidement.
Un axiome désigne une vérité indémontrable qui doit être admise. L'axiome est utilisé comme fondement d'un raisonnement.
Pour certains philosophes grecs de l'Antiquité, un axiome était une affirmation qu'ils considéraient comme évidente et qui n'avait pas besoin de preuve.

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