Avec une masse de \(1,898 \times 10^{27}\) kg, soit plus de 318 fois celle de la Terre, Jupiter domine le Système solaire par sa gravité et son influence orbitale. Son diamètre équatorial atteint 142 984 km, soit environ 11,2 fois celui de la Terre (12 742 km), ce qui en fait la plus grande planète du système solaire. Sa composition, à ≈70 % d’hydrogène et ≈20 % d’hélium, est proche de celle du Soleil, ce qui lui vaut le surnom d’« étoile manquée ». Pourtant, la pression et la température en son centre, bien que colossales, ne suffisent pas à déclencher la fusion thermonucléaire.
| Constituant | Proportion massique | Localisation principale | Remarques |
|---|---|---|---|
| Hydrogène (H₂) | ≈ 71 – 74 % | Enveloppe externe et couche métallique | Principal gaz de Jupiter ; devient métallique sous pression > 3 Mbar |
| Hélium (He) | ≈ 23 – 25 % | Atmosphère et couches internes | Appauvri dans la haute atmosphère à cause de la sédimentation vers le centre |
| Éléments lourds (O, C, N, Si, Fe, Mg, S, etc.) | ≈ 3 – 6 % | Cœur rocheux et glacé | Représente 10 à 20 masses terrestres ; formé avant l’accrétion de gaz |
Source : NASA – Mission Juno (2024), ESA – Mission JUICE.
Pour qu’un corps céleste amorce la fusion de l’hydrogène, il doit atteindre une masse critique d’environ 75 fois celle de Jupiter. Dans le cas contraire, la pression interne reste insuffisante pour que les protons surmontent leur répulsion électrostatique, condition nécessaire à la réaction \(\mathrm{H + H \rightarrow He}\). Ainsi, Jupiter est restée une planète géante gazeuse, possédant toutefois un cœur rocheux ou glacé d’environ 10 à 20 masses terrestres, recouvert d’une immense enveloppe d’hydrogène métallique. À l’intérieur de Jupiter, cette phase apparaît à des profondeurs d’environ 15 000 à 20 000 km sous la surface visible. L’hydrogène métallique y joue un rôle crucial dans la génération du champ magnétique interne, par effet dynamo. Sa transition partielle entre les états moléculaire et métallique contribue aussi à la libération d’énergie gravitationnelle et thermique qui alimente le rayonnement infrarouge de la planète.
N.B. :
L’hydrogène métallique est un état exotique de la matière prédit par Eugene Wigner (1902-1991) et Hillard Bell Huntington (1903-1989) en 1935. Sous des pressions supérieures à 3 millions d’atmosphères (≈ 3 Mbar), les atomes d’hydrogène perdent leurs électrons de valence, formant un réseau d’ions H⁺ plongé dans un « gaz d’électrons libres ». Ce comportement confère à l’hydrogène des propriétés métalliques : conductivité électrique élevée et réflexion optique comparable à celle d’un métal liquide.
Jupiter émet environ 1,7 fois plus d’énergie qu’elle n’en reçoit du Soleil. Cette énergie provient de la lente contraction gravitationnelle de la planète, un phénomène appelé mécanisme de Kelvin-Helmholtz. En se contractant très lentement, Jupiter convertit une partie de son énergie gravitationnelle en chaleur interne, qu’elle rayonne dans l’infrarouge.
L’atmosphère de Jupiter se compose de couches nuageuses disposées en bandes parallèles à l’équateur. Ces bandes alternent entre zones claires et sombres, appelées respectivement zones et bandes. Des vents atteignant plus de 500 km/h y soufflent en permanence. La célèbre Grande Tache rouge est un gigantesque anticyclone de 12 000 km de diamètre (≈12 756 km pour la Terre), actif depuis plus de 300 ans selon les observations de Giovanni Cassini (1625-1712).
Le système jovien compte aujourd’hui plus de 95 satellites naturels confirmés, dont les quatre plus grands — Io, Europe, Ganymède et Callisto — furent découverts en 1610 par Galileo Galilei (1564-1642). Ces lunes galiléennes forment un ensemble dynamique qui rappelle à petite échelle un véritable système planétaire. Leur observation a d’ailleurs permis à Galilée de démontrer que tous les corps célestes ne tournent pas autour de la Terre, appuyant la validité du modèle héliocentrique de Copernic (1473-1543).
| Nom de la lune | Rayon (km) | Distance moyenne à Jupiter (km) | Caractéristiques principales | Personnage mythologique |
|---|---|---|---|---|
| Io | 1 821 | 421 800 | Lune la plus volcanique du Système solaire, surface jeune et sulfurée | Nymphe aimée de Zeus (Jupiter), transformée en génisse pour échapper à Héra |
| Europe | 1 561 | 671 100 | Surface glacée lisse, océan interne sous la glace, candidat à la vie microbienne | Princesse phénicienne enlevée par Zeus sous la forme d’un taureau blanc |
| Ganymède | 2 634 | 1 070 400 | Plus grande lune du Système solaire, possède un champ magnétique et un océan interne | Jeune prince troyen enlevé par Zeus pour devenir l’échanson des dieux |
| Callisto | 2 410 | 1 882 700 | Lune ancienne et cratérisée, noyau peu différencié, possible océan profond | Nymphe d’Artémis séduite par Zeus, transformée en ourse puis en constellation |
| Amalthée | 83 | 181 400 | Lune irrégulière rougeâtre, très proche de Jupiter, éclairement thermique intense | Chèvre nourricière de Zeus dans son enfance, symbole d’abondance |
| Himalia | 85 | 11 480 000 | Lune irrégulière du groupe Himalia, orbite prograde inclinée | Nymphe que Zeus rendit mère de trois fils |
| Elara | 43 | 11 740 000 | Lune irrégulière, probablement un fragment capturé | Nymphe aimée de Zeus, mère du géant Tityos |
| Pasiphaé | 30 | 23 500 000 | Lune rétrograde du groupe Pasiphaé, probable corps capturé | Épouse de Minos et mère du Minotaure, fille du Soleil Hélios |
| Sinope | 19 | 23 860 000 | Petite lune rétrograde, de forme irrégulière, groupe Pasiphaé | Princesse que Zeus voulut séduire, mais qu’elle trompa pour rester vierge |
| Lysithéa | 18 | 11 720 000 | Lune irrégulière, orbite légèrement inclinée | Nymphe aimée de Zeus, mère de Dionysos selon certaines versions |
Au-delà de ces lunes géantes, de nombreux satellites irréguliers orbitent plus loin, souvent capturés par gravité. Leur distribution complexe renseigne sur les processus d’accrétion et de migration planétaire survenus il y a plus de 4,5 milliards d’années.
La masse colossale de Jupiter, équivalente à 318 fois celle de la Terre, confère à la planète un rôle fondamental dans la stabilité gravitationnelle du système solaire. Son immense champ gravitationnel agit comme un bouclier naturel pour les planètes internes, notamment la Terre, en déviant ou en capturant un grand nombre de comètes et d’astéroïdes potentiellement dangereux. Ce phénomène, appelé diffusion gravitationnelle, modifie la dynamique des petits corps issus de la ceinture d’astéroïdes et du nuage de Oort.
Les simulations orbitales montrent que, sans Jupiter, le flux de projectiles interplanétaires vers la Terre serait multiplié par un facteur compris entre 10 et 100 selon les modèles (Horner et Jones, 2010). La planète agit également comme un stabilisateur dynamique : elle limite les perturbations orbitales de Mars et de la ceinture principale en absorbant une partie des résonances gravitationnelles.
Cependant, son influence n’est pas uniquement protectrice. Certaines de ses résonances de Lindblad et de résonances de mouvement moyen peuvent au contraire déstabiliser des astéroïdes, les éjectant vers le système interne. Ainsi, Jupiter agit à la fois comme gardienne et architecte du système solaire, sculptant en permanence la distribution des orbites planétaires et des petits corps.
N.B. :
Le rôle protecteur de Jupiter reste débattu. Si la planète géante réduit la fréquence des impacts catastrophiques, elle peut aussi rediriger certains objets vers les planètes internes. Son effet global sur la probabilité d’impact dépend fortement des époques dynamiques et de la répartition des comètes à longue période.
Pour comprendre la différence fondamentale entre Jupiter et une étoile comme le Soleil, il est utile de comparer leurs paramètres physiques essentiels.
| Caractéristique | Jupiter | Soleil | Commentaire |
|---|---|---|---|
| Masse | \(1,898 \times 10^{27}\) kg | \(1,989 \times 10^{30}\) kg | Il faudrait 75 Jupiter pour atteindre la masse minimale d’une étoile rouge naine |
| Rayon | 71 492 km | 696 340 km | Le Soleil est presque dix fois plus grand |
| Température centrale | ≈ 20 000 K | ≈ 15 000 000 K | La fusion nucléaire requiert > 4 × 106 K |
| Source d’énergie | Contraction gravitationnelle | Fusion de l’hydrogène | Le Soleil transforme l’hydrogène en hélium, Jupiter non |
N.B. :
Si la nébuleuse protosolaire avait été un peu plus massive dans sa région externe, le cœur de Jupiter aurait pu atteindre le seuil critique d’environ 13 masses joviennes. Mais le gaz disponible dans le disque circumsolaire, déjà appauvri par la formation du Soleil, n’a pas permis un effondrement gravitationnel complet. Jupiter est ainsi le produit d’une étoile inachevée, née d’un réservoir local trop peu dense pour s’allumer.