Europe, quatrième plus grande lune de Jupiter (diamètre : 3 122 km), est l'un des corps les plus fascinants du système solaire. Découverte par Galilée Galilei (1564-1642) en 1610, elle se distingue par :
Une surface de glace d'eau extrêmement lisse (peu de cratères), suggérant une activité géologique récente.
Un albédo élevé (0,67), reflétant la lumière du Soleil.
Des lignes rougeâtres ("lineae") longues de milliers de kilomètres, probablement causées par des fractures et du sulfure de magnésium.
Une activité tectonique visible dans les zones de "chaos" (ex : Conamara Chaos).
L'océan souterrain : un monde habitable ?
Les données des missions Galileo (1995-2003) et Juno (depuis 2016) ont confirmé l'existence d'un océan global souterrain sous une croûte de glace de 15 à 25 km d'épaisseur. Cet océan aurait :
Une profondeur estimée entre 60 et 150 km (2 à 3 fois les océans terrestres).
Un volume d'eau 2 à 3 fois supérieur à celui de tous les océans terrestres réunis.
Une salinité similaire à celle des océans terrestres, avec des sels comme le MgSO₄.
Une source de chaleur provenant des forces de marée exercées par Jupiter (effet de chauffage tidale).
Preuves de l'océan souterrain
Plusieurs observations confirment l'existence de l'océan :
Champ magnétique induit : Les données de la sonde Galileo ont révélé un champ magnétique variable, compatible avec une couche d'eau salée conductrice sous la glace (Kivelson et al., 2000).
Geysers de vapeur d'eau : En 2013 et 2016, le télescope Hubble a détecté des panaches de vapeur d'eau s'élevant jusqu'à 200 km au-dessus du pôle sud. Ces geysers, similaires à ceux d'Encelade, suggèrent une activité cryovolcanique (Roth et al., 2014).
Modèles thermiques : Les calculs de chauffage tidale montrent que l'énergie dissipée par les forces de marée de Jupiter (≈ 1013 watts) est suffisante pour maintenir un océan liquide (Tyler, 2008).
Analyse des fractures : Les "lineae" et les zones de chaos (comme Conamara Chaos) indiquent des mouvements de la croûte de glace, compatibles avec un océan sous-jacent (Greenberg et al., 1999).
Habitabilité et recherche de vie
Europe est considérée comme l'un des meilleurs candidats pour la vie extraterrestre dans le système solaire. Plusieurs facteurs rendent son océan potentiellement habitable :
Énergie : Le chauffage tidale pourrait fournir une source d'énergie pour des écosystèmes chimiotrophes, similaires aux sources hydrothermales terrestres.
Chimie : La détection de peroxyde d'hydrogène (H₂O₂) et de sels (comme MgSO₄) suggère un environnement chimiquement riche (Carlson et al., 2009).
Stabilité : L'océan existe depuis environ 4 milliards d'années, offrant une période suffisante pour l'émergence de la vie.
Analogues terrestres : Les environnements extrêmes sur Terre (comme le lac Vostok en Antarctique ou les sources hydrothermales) servent de modèles pour étudier la vie potentielle sur Europe.
Missions d'exploration
Chronologie des missions ayant observé Europe
Mission
Agence
Période
Découvertes clés
Statut
Voyager 1 & 2
NASA
1979
Premières images détaillées, découverte des "lineae".
Terminée
Galileo
NASA
1995–2003
Preuves du champ magnétique induit, modèle de l'océan souterrain.
Terminée
Hubble
NASA/ESA
2013–2022
Détection de panaches de vapeur d'eau.
Terminée (remplacé par JWST)
Juno
NASA
2016–2025
Images haute résolution, analyse de la composition de la surface.
En cours
Europa Clipper
NASA
Lancement en 2024, arrivée en 2030
Étude détaillée de l'habitabilité, analyse des panaches, radar pour mesurer l'épaisseur de la glace.
En développement
JUICE
ESA
Lancement en 2023, arrivée en 2031
Étude des lunes galiléennes (dont Europe), focus sur Ganymède.
En transit
Défis et perspectives futures
L'exploration d'Europe présente plusieurs défis :
Environnement radiatif : Jupiter émet un intense rayonnement (≈ 540 rem/jour à la surface d'Europe), nécessitant un blindage renforcé pour les sondes.
Atterrissage : La surface glacée et fracturée rend un atterrissage difficile. La mission Europa Lander (proposée par la NASA) étudierait la faisabilité d'un atterrisseur.
Accès à l'océan : Percer 15 à 25 km de glace nécessite des technologies innovantes (ex : sondes cryobotiques chauffantes).
Protection planétaire : Les protocoles de stérilisation doivent être stricts pour éviter toute contamination de l'océan par des microbes terrestres.
Malgré ces défis, Europe reste une cible prioritaire pour la recherche de vie extraterrestre. Les futures missions, comme Europa Clipper, pourraient apporter des réponses décisives sur l'habitabilité de son océan et la présence éventuelle de formes de vie microbiennes.