Tout comme les cathédrales, les grands télescopes permettent de découvrir la composition du ciel profond, dans la lumière visible et invisible, et les Cieux sont leur domaine.
L'analogie est osée, mais les "cathédrales modernes" sont les télescopes géants car ces édifices prestigieux, de grandes envergures, sont conçus pour réfléchir sur l'origine de notre création, le Big Bang.
Cependant, le plus grand télescope est à venir, il sera situé dans le désert d’Atacama au Chili, non loin du VLT, ses premières lueurs sont prévues pour 2024-2026, il s'appelle E−ELT (European Extremely Large Telescope). C'est un géant modulable, son miroir principal mesure 39,3 m, en réalité c'est un miroir formé de 798 segments hexagonaux (petits miroirs d'environ 1,40 m de largeur et de 5 cm d'épaisseur), répartis sur une surface collectrice de 1116 m2.
Cet instrument pharaonique dont la coupole est à ≈ 80 mètres de hauteur, sera quatre à cinq fois plus grand que les télescopes du VLT actuels (image ci-contre) et collectera environ quinze fois plus de lumière. En plus du miroir principal de 39 m de diamètre, il sera équipé d’un miroir secondaire de 4,2 m, de deux miroirs de 3,8 m et 2,4 m et d’un miroir elliptique de 2,6 x 2,1 m.
Les télescopes géants grâce à leur grande ouverture servent à collecter de la lumière, beaucoup de lumière afin d'obtenir des images lointaines toujours plus fines.
Que veut-on faire avec des télescopes géants ?
Relever les plus grands défis scientifiques de notre époque, en d'autres termes :
- voir la naissance de l'Univers, le Big Bang qui a eu lieu il y a 13,7 milliards d'années. Voir les premières lueurs de la naissance de la matière dite ordinaire, celle dont nous sommes fait et surtout la matière dont nous ne sommes pas fait, la matière noire et l'énergie sombre.
- voir les extraterrestres cachés dans ce vaste Univers, c'est-à-dire voir les planètes extrasolaires de la masse de la Terre, gravitant dans la « zone habitable » d'autres étoiles.
- mettre à l'épreuve nos constantes physiques et nos lois physiques jusqu'à l'échelle de Planck.
Nul doute que ce monstre de haute technologie nous montrera aussi des aspects inattendus de l'Univers, qui soulèveront des questions nouvelles, comme chaque fois en cosmologie lorsque l'on franchit un cap conceptuel.
Pour cela, les scientifiques ont inventé, dans les années 1990, un concept de machine optique révolutionnaire, c'est ce concept qui sera utilisé à grande échelle dans les années 2020 avec l'E-ELT (European Extremely Large Telescope).
La révolution technologique vient de la taille de ses instruments et en particulier de son système d'optique active segmentée qui permet de faire des miroirs géants. En effet la taille des plus grands miroirs monolithiques avant le concept ELT, ne dépassait pas 8.4 m, car au delà, les industriels étaient confrontés à un défis technique infranchissable. Les miroirs primaires solides d'une seule pièce, de plus de 8 m, ne supporte pas leur propre poids sans se déformer sous l'effet de la gravité. De plus, la fragilité et le poids du miroir ne permettaient plus son transport.
Le plus grand miroir monolithique (8.4 m), est celui du télescope Subaru mis en service en 1998 sur le site du Mauna Kea à Hawaï.
E-ELT est équipé d'un miroir principal gigantesque de 39 mètres de diamètre. Il est formé de 798 segments hexagonaux de 1,4 m de largeur et de 5 cm d'épaisseur, sa surface collectrice est de 978 m2, sa masse totale est d'environ 150 tonnes. Avec ce miroir, le télescope de l'ESO peut couvrir un champ céleste de ≈5° (dix fois la taille de la pleine Lune).
Mais pour son bon fonctionnement, l'ensemble de l'instrumentation nécessite d'autres miroirs. E-ELT est aussi équipé d'un miroir secondaire de 4,2 m sur lequel la lumière du miroir primaire se réfléchit.
Le système d'optique adaptative se compose d'un autre grand miroir déformable de 2,4 m de diamètre qui corrige en temps réel, toutes les millisecondes, le flou des images, provoqué par les turbulences atmosphériques imprévisibles. Ce miroir est piloté par un ordinateur qui analyse les caprices de l'atmosphère et déforme le miroir en agissant en permanence sur 7000 actuateurs (actionneurs piézoélectriques c'est-à-dire des pistons électroniques placés de l'autre côté du miroir, qui poussent ou tirent afin que la surface totale préserve sa forme idéale).
Pour analyser les perturbations, le système a besoin d'une référence dans le ciel, pour cela des étoiles artificielles sont créées à l’aide de 5 à 6 lasers au sodium. Le Laser Guide Star (LGS) est utilisé comme référence pour corriger l'effet de flou de l'atmosphère sur les images. La couleur du laser est réglé avec précision pour dynamiser une couche d'atomes de sodium présents dans l'une des couches supérieures de l'atmosphère. Le faisceau laser rebondit sur cette couche et fait apparaitre une étoile de référence.
Une multitude d'autres instruments seront créés et testés sur les télescopes existants avant d'être déployés dans leurs versions géantes, sur le E-ELT.
Le site choisi pour cette merveille technologique est le Cerro Armazones, une montagne de 3064 m dans la cordillère de la Costa, située à ≈130 km au sud-est d'Antofagasta, au Chili. Une fois la montagne arasée par les pelleteuses et les excavatrices, le télescope géant sera installé sur le sommet aplati à ≈2800 mètres d'altitude.
A partir de décembre 2014, le télescope peut entrer dans sa phase de construction car l'engagement financier a atteint plus de 90% du cout total de la première phase.
“Les fonds d'ores et déjà engagés permettront la construction d'un E-ELT pleinement opérationnel, qui, grâce à une surface collectrice plus grande et à son instrumentation de pointe, constituera le plus puissant des télescopes géants actuellement en cours de conception. Il permettra la caractérisation initiale des exoplanètes de type Terre, l'étude de populations stellaires dans les galaxies proches, ainsi que des observations ultrafines de l'Univers profond”, conclut Tim de Zeeuw (directeur général de l'ESO).
List of largest optical reflecting telescopes (Top telescopes of 2010) | |||||
Name | Aperture | Country | Site | Altitude | Date |
Southern African Large Telescope (SALT) | 11 m | South Africa, USA, UK, Germany, Poland, New Zealand | Sutherland, South Africa | 1 759 m | 2005 |
Gran Telescopio Canarias (GTC) | 10.4 m | Spain | La Palma, Canary Islands | 2 396 m | 2005 |
Keck 2 | 9.8 m | USA | Mauna Kea, Hawaii | 4 145 m | 1996 |
Keck 1 | 9.8 m | USA | Mauna Kea, Hawaii | 4 145 m | 1993 |
Telescope Hobby-Eberly (HEB) | 9.2 m | USA, Germany | Mont Fowlkes, Texas | 1 980 m | 1997 |
Large Binocular Telescope (LBT) | 2 x 8.4 m | Italy, USA, Germany | Mont Graham, Arizona | 3 267 m | 2004 |
Subaru (NLT) | 8.3 m | Japan | Mauna Kea, Hawaii | 4 139 m | 1999 |
Very Large Telescope UT1 (Antu) | 8.2 m | Europa (ESO) | Cerro Paranal, Chili | 2 635 m | 1998 |
Very Large Telescope UT4 (Kueyen) | 8.2 m | Europa (ESO) | Cerro Paranal, Chili | 2 635 m | 1999 |
Very Large Telescope UT4 (Melipal) | 8.2 m | Europa (ESO) | Cerro Paranal, Chili | 2 635 m | 2000 |
Very Large Telescope UT4 (Yepun) | 8.2 m | Europa (ESO) | Cerro Paranal, Chili | 2 635 m | 2001 |
Gemini North | 8.1 m | USA, UK, Canada, Chile, Australia, Argentina, Brazil | Mauna Kea, Hawaï | 4 205 m | 1999 |
Gemini South | 8.1 m | USA, UK, Canada, Chile, Australia, Argentina, Brazil | Cerro Pachón, Chili | 2 715 m | 2001 |
MMT | 6.5 m | USA | Arizona, USA | 2 347 m | 2000 |
Magellan 1 (Walter Baade) | 6.5 m | USA | Coquimbo Region, Chile | 2 380 m | 2000 |
Magellan 2 (Landon Clay) | 6.5 m | USA | Coquimbo Region, Chile | 2 380 m | 2002 |