Saviez-vous que la Terre n'est pas seule sur son orbite ? Des astéroïdes troyens, véritables compagnons cosmiques, partagent discrètement notre trajectoire autour du Soleil.
Les points de Lagrange \(L_4\) et \(L_5\) du système Terre-Soleil sont des positions d’équilibre gravitationnel situées à 60° en avant et en arrière de la Terre (~150 millions km) sur son orbite. Théoriquement stables pour des petites perturbations, ces points forment des puits potentiels où peuvent se loger des petits corps célestes : les astéroïdes troyens.
Du point de vue de la Terre et du Soleil, ces points maintiennent les astéroïdes en place grâce à un équilibre subtil entre gravité et force centrifuge, rendant ces points stationnaires pour un petit corps. Ces points d'équilibre ne sont pas des lieux fixes dans l'espace absolu, mais se déplacent en synchronisme orbital avec la Terre autour du Soleil. Ils offrent ainsi un site privilégié pour héberger des astéroïdes de façon semi-stable pendant plusieurs milliers d’années.
Ce n’est qu’au XXIe siècle que les premiers troyens terrestres y ont été détectés, en raison de contraintes observationnelles majeures : les points \(L_4\) et \(L_5\) sont proches du Soleil dans le ciel terrestre, ce qui rend leur observation difficile avec des instruments au sol. Il faut scruter le ciel au crépuscule ou à l’aube, dans des conditions de luminosité défavorables. Ces zones ont dû héberger de nombreux objets capturés temporairement au gré des perturbations planétaires.
Le terme "troyen" provient d’une convention de nommage introduite au début du XXe siècle, à la suite de la découverte d’astéroïdes partageant l’orbite de Jupiter. En 1906, l’astéroïde Achilles est identifié près du point de Lagrange \(L_4\) de Jupiter. Par tradition, les objets situés à \(L_4\) ont été nommés d’après des héros grecs (Achille, Ulysse…), tandis que ceux à \(L_5\) reçoivent des noms issus du camp troyen (Hector, Priam…).
Depuis, le terme "troyen" désigne par extension tout petit corps gravitant autour des points de Lagrange \(L_4\) ou \(L_5\) d’une planète. On parle ainsi de troyens de Jupiter, de Mars, de Neptune… et désormais de troyens de la Terre.
Cette désignation est donc historique et dynamique, sans rapport direct avec la ville de Troie, mais issue de la structure en triangle équilatéral stable des points de Lagrange, révélée par la mécanique céleste.
Les astéroïdes troyens sont donc des corps célestes gravitationnellement piégés autour des points de Lagrange \(L_4\) et \(L_5\) d’une planète. Dans le système solaire, Jupiter en possède des milliers, mais la Terre n’en compte que quelques-uns confirmés à ce jour.
Leur dynamique s’explique dans le cadre du problème restreint à trois corps, où le troisième corps (l'astéroïde) a une masse négligeable. Il est piégé autour des points \(L_4\) et \(L_5\) lorsque la force centrifuge compense exactement l’attraction combinée du Soleil et de la Terre.
Le premier troyen terrestre (2010 TK7) a failli être manqué : il a été repéré grâce à des analyses rétrospectives des données du télescope spatial WISE ! Découvert en 2010, 2010 TK7 est le premier troyen terrestre identifié. Il suit également une orbite autour du point \(L_4\), mais avec une inclinaison beaucoup plus forte (près de 21°), ce qui rend sa dynamique plus chaotique et sa stabilité plus brève.
Sa trajectoire forme une figure complexe de type "haricot" dans un référentiel tournant, oscillant autour de \(L_4\) sur des échelles de plusieurs millénaires. Bien que sa taille soit modeste (~300 m), sa découverte a ouvert la voie à une nouvelle classe d’objets coorbitaux.
Paramètre | Valeur | Unité |
---|---|---|
Demi-grand axe | 1.00037 | UA |
Excentricité | 0.190 | - |
Inclinaison | 20.9 | ° |
Diamètre estimé | 0.3 | km |
Point de Lagrange | L₄ | - |
Stabilité orbitale | ~10 000 | ans |
Sources : NASA WISE (2011), Connors et al., Nature (2011)
L’astéroïde 2020 XL5, découvert par le télescope Pan-STARRS en 2020, est le plus grand et le plus stable des troyens terrestres connus. Il orbite autour du point de Lagrange \(L_4\), à 60° devant la Terre, sur une orbite inclinée et modérément excentrique.
Les simulations dynamiques montrent que sa trajectoire est stable pour environ 4 000 ans, après quoi il pourrait quitter la région co-orbitale. Avec un diamètre estimé à 1,2 km, il pourrait représenter une cible potentielle pour une mission spatiale.
Paramètre | Valeur | Unité |
---|---|---|
Demi-grand axe | 1.00021 | UA |
Excentricité | 0.514 | - |
Inclinaison | 13.8 | ° |
Diamètre estimé | 1.18 | km |
Point de Lagrange | L₄ | - |
Stabilité orbitale | ~4 000 | ans |
Sources : NASA/JPL (2023), C. de la Fuente Marcos et al. (2022)
Nom | Demi-grand axe (UA) | Excentricité | Inclinaison (°) | Point de Lagrange | Diamètre estimé (m) | Stabilité orbitale | Référence |
---|---|---|---|---|---|---|---|
2020 XL5 | 1.00021 | 0.514 | 13.8 | L₄ | 1180 | ~4 000 ans | NASA JPL SBDB (2023) |
2010 TK7 | 1.00037 | 0.190 | 20.9 | L₄ | 300 | ~10 000 ans | WISE/NASA (2011) |
2015 XX₁₆₉ | 0.9999 | 0.180 | 8.5 | L₅ (quasi) | — | ~1 000 ans | Morais & Morbidelli (2006) |
2010 SO₁₆ | 1.0001 | 0.075 | 14.5 | L₄ (quasi) | — | ~350 000 ans | Christou & Asher (2011) |
2023 FW₁₃ | 1.002 | 0.21 | 13.0 | L₄ (provisoire) | — | À confirmer | JPL Horizons (2024) |
Sources : JPL Horizons (2024), Morais & Morbidelli (2006), Christou & Asher (2011)
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