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  ⚡ Paradoxe de Fermi ou caverne de Platon

Image : Cette image de 3,1 x 3,1 minutes d'arc a nécessité 800 expositions prises au cours de 400 orbites du télescope spatial Hubble autour de la Terre. La durée totale d'exposition a été de 11,3 jours (entre le 24 septembre 2003 et le 16 janvier 2004). Dans cette très petite zone du ciel austral située dans la constellation du Fourneau, on compte environ 10000 galaxies.
Crédit : NASA , ESA et S. Beckwith (STScI) et l'équipe HUDF

Où sont-ils donc ?

La Lune occupe dans le ciel environ 31 minutes d'angle soit ½ degré. Le champ ultra profond du ciel (image ci-contre) capturé par le télescope spatial Hubble occupe 3,1 minutes dans le ciel soit environ un dixième du diamètre de la Lune.
Dans cette toute petite surface, les astronomes ont compté environ 10000 galaxies. Certaines de ces galaxies existaient déjà alors que l'univers âgé de 13,77 milliards d'années n'avait que 800 millions d'années.
Il y aurait donc environ 2000 milliards de galaxies dans notre Univers observable.
Si l'on considère que le nombre d'étoiles présentes dans notre galaxie est de seulement 100 milliards, il y aurait 2000 milliards x 100 milliards d'étoiles dans notre univers. Ce nombre (200 000 000 000 000 000 000 000) est inimaginable.
On sait maintenant que la présence de planètes autour d'une étoile est relativement fréquente. Et s'il n'y avait qu'une seule planète autour de chaque étoile, alors le nombre de planètes serait aussi inimaginable (2x1023).
Les conditions physiques sont les mêmes partout dans l'Univers. Les galaxies contiennent des étoiles, les étoiles ont des planètes, les planètes sont constituées d'éléments chimiques générés par les étoiles. Même si les conditions nécessaires à l'émergence d'une civilisation évoluée sont imprévisibles, contingentes, le nombre de planètes existantes nous permet de penser que de nombreuses civilisations se soient développées quelque part dans l'univers. Il serait étonnant que la nature, s'étant structurée de la même manière à toutes les échelles, n'ait trouvé le chemin de la vie uniquement sur notre planète.
La question posée en 1950 par Enrico Fermi lors d'une conversation informelle découle de cette constatation.
« Sommes-nous la seule civilisation intelligente et technologiquement avancée de l'Univers ? » Autrement dit, s'il y avait des civilisations extraterrestres, leurs représentants devraient déjà être là. Où sont-ils donc ?
Aucune preuve scientifique n'a été détectée depuis l'avènement de la technologie, aucune sonde, aucun vaisseau spatial, aucune transmission radio et donc aucune trace irréfutable.
Cependant il est difficile de croire que la vie n'existe que sur Terre car les briques de base de la vie ont été détectées dans le milieu interstellaire (molécules prébiotiques, acides aminés, peptides). Et partout où il y a de l'eau liquide, il y a une possibilité de vie même dans des endroits où l'énergie du soleil ne pénètre pas comme dans nos abysses.
La ténacité de la vie n'est-elle pas la preuve qu'elle est présente partout dans l'Univers, attendant patiemment un contexte favorable pour poursuivre son chemin vers l'intelligence ?
Il aura fallu qu'un Univers naisse, que des galaxies fusionnent, que des étoiles meurent pour générer tous les éléments chimiques, qu'un système stellaire se stabilise dans une zone protégée d'une galaxie pour qu'une vie intelligente apparaisse sur une planète, la notre, soit 13.61 milliards d'années (âge de la Voie Lactée). Et nous n'avons pas encore la technologie pour voyager dans la Galaxie...
Puisqu'il faut pratiquement l'âge de l'univers pour qu'une civilisation capable de quitter sa planète apparaisse, on pourrait conclure immédiatement qu'il n'y a pas de paradoxe, nous sommes seuls car nous sommes les premiers.
Adoptons le principe de médiocrité et quittons cette vision anthropique de la vie extraterrestre. Essayons d'analyser scientifiquement les possibilités que nous ne soyons pas seuls !

L'hypothèse de la Terre rare

Image : la Terre photographiée par Apollo 8 entre le 21/12 et le 27/12/1968.

Parmi les 100 milliards de systèmes stellaires de la Galaxie, il y a probablement beaucoup de planètes similaires à la Terre. Mais l'hypothèse de la Terre rare soutient que l'émergence de la vie intelligente sur notre planète est contingente car elle a exigé une très longue séquence improbable d'évènements astrophysiques, géologiques, biochimiques, biologiques, darwiniens, paléontologiques, ce qui la rend unique.
En effet, l'apparition de la vie telle qu'elle existe sur la Terre a dû franchir un nombre considérable de barrières. Parmi ces barrières difficiles à franchir, il y a par exemple, la photosynthèse, l'apparition de l'ADN, le passage des procaryotes aux eucaryotes, l'endosymbiose, le passage à la vie multicellulaire, la reproduction sexuelle, l'apparition d'êtres intelligents, la découverte des sciences, le passage à une civilisation technologiquement avancée.
Toutes ces barrières n'ont été franchies qu'une seule fois sur la Terre en 4,543 milliards d'années (âge de la Terre) ce qui rend la séquence extrêmement improbable.
Cette hypothèse nous oblige à abandonner l'idée que cela s'est produit de nombreuses fois et donc nous serions les premiers à vouloir explorer et coloniser l'univers.
L'hypothèse de la Terre rare s'oppose au principe de médiocrité qui dit que la Terre est une planète quelconque, dans un système planétaire quelconque, localisé dans une région banale d'une galaxie quelconque.
Si l'émergence de la vie telle que nous la voyons sur Terre est improbable cela ne veut pas dire que nous soyons seuls dans l'univers. La complexité de notre existence n'en est peut-être qu'à ces débuts, des vies beaucoup plus complexes, inimaginables peuvent exister.

N. B. : L'expression « Terre rare » provient du livre Rare Earth: Why Complex Life Is Uncommon in the Universe (2000), étude coécrite par le géologue et paléontologue Peter Ward, et l'astronome et astrobiologiste Donald E. Brownlee.

L'infranchissable barrière

Image : Vue d'artiste de la Voie lactée qui montre la position du Soleil dans le bras d'Orion, un endroit protégé de la zone habitable de notre Galaxie.

Les voyages ne sont possibles que dans la galaxie !
L'étoile la plus proche de nous est à 4,3 années-lumière. Avec la technologie actuelle (propulsion chimique) on peut voyager, en s'aidant des autres planètes, à 30 km/s soit 1/10000 de la vitesse de la lumière. A cette vitesse, une sonde voyagerait pendant ∼40 000 ans avant d'arriver au voisinage de Proxima Centauri.
Imaginons que nous arrivions à atteindre 10 % de la vitesse de la lumière dans les siècles à venir. Il faudrait tout de même 40 ans pour visiter l'étoile la plus proche sachant que le diamètre de la Voie lactée mesure ∼100 000 années-lumière.
Cependant, la Terre a 4.54 milliards d'années, les premières traces de vie (cyanobactéries) ont 3.48 milliards d'années, les premiers poissons ont 530 millions d'années, les premiers mammifères sont apparus il y a 125 millions d'années, les premiers primates, 56 millions d'années, les premiers hominidés, 10 millions d'années et Homo sapiens, 300 000 ans. L'agriculture apparait il y a 12 000 ans, l'ère spatiale a 65 ans (Spoutnik 1 en 1957) et Voyager 1 a quitté le système solaire en 2012.
Cette accélération fulgurante nous permet de penser que quelques siècles suffiront pour atteindre les premières étoiles proches en quelques années avec une autre technologie (propulsion par fusion nucléaire ou grâce à l'antimatière).
Dès que la première étoile sera atteinte, les humains pourraient repartir sur l'étoile suivante la plus proche en quelques milliers d'années et ainsi de suite. A ce rythme, même si certaines civilisations n'adoptent pas le concept de colonisation, il faudrait seulement quelques dizaines de millions d'années pour coloniser la partie de la Voie Lactée qui se situe dans sa zone habitable.
Mais la barrière infranchissable que constitue la vitesse limite de la lumière nous oblige à abandonner les voyages intergalactiques qui se mesurent eux en milliards d'années.
Les distances entre les galaxies sont si grandes que les communications seraient impossibles et notre curiosité ne serait pas satisfaite. Nous ne quitterons probablement jamais notre Galaxie.

Extinction de la vie intelligente

Image : un sursaut gamma aurait pu participer à l'extinction de l'Ordovicien-Silurien (∼445 Ma). Crédit NASA bulle de lumière d'un sursaut gamma.

Une autre raison pour laquelle nous ne captons aucune trace de vie intelligente pourrait être la trop courte durée de vie d'une civilisation.
Il faut un temps long pour qu'un système biologique se stabilise et qu'apparaisse une civilisation technologiquement avancée. Il a fallu 4.54 milliards d'années sur terre. De nombreuses catastrophes naturelles peuvent empêcher ou retarder cet avènement.
Dans les derniers 500 millions d'années, il y a eu au moins 5 extinctions de masse dues à une grande glaciation (∼445 Ma), aux crises biologiques majeures (∼370 Ma et ∼250 Ma), aux épisodes volcaniques et impacts d'astéroïdes (∼200 Ma et ∼65 Ma).
Mais bien d'autres catastrophes naturelles (épuisement des ressources, autodestruction, dérèglement climatique) ou évènements cosmiques très proches (sursauts gamma, explosions de supernova) peuvent ralentir l'avènement d'une civilisation technologiquement avancée.
Après tout nous ne sommes capables d'émettre des signaux électromagnétiques que depuis une centaine d'années seulement, ce qui est une durée vraiment courte par rapport à l'âge de la Terre. Nos très faibles signaux électromagnétiques n'ont atteint que les plus proches étoiles, celles situées à moins de 100 années-lumière.

La vie a envahi les mondes virtuels

Image : les mondes parallèles dotés d'intelligence artificielle impossibles à distinguer de la réalité finissent par produire leurs propres simulations !!!

Il est possible que toutes les civilisations atteignent une technologie digitale avancée et finissent par comprendre que les voyages interstellaires sont inutiles et inintéressants, que les distances sont trop grandes, que l'énergie nécessaire est trop dispendieuse et que de toute façon leurs descendants éventuels ayant quitté la Terre disparaitront à jamais dans les zones sombres de la Voie Lactée.
Par contre, des machines pouvant contenir toute l'information d'un corps humain seraient bien plus intéressantes. L'exploration des mondes physiques devenue inutile, les nouvelles civilisations préfèrent vivre exclusivement dans leur propres simulations.
En créant de nouvelles civilisations peuplées d'avatars elles transforment le monde réel, imparfait, dégénérescent et corruptible par des mondes virtuels intelligibles et parfaits.
Ces mondes aussi riches que le monde réel finissent par posséder un degré de réalité supérieure à la réalité matérielle et sensible.
Il est probable qu'à force de vivre dans les mondes virtuels bien plus vastes où tout fonctionne mieux, que le monde réel finisse par devenir inintéressant et se sublime en un monde virtuel.
La frontière entre réel et virtuel devenue poreuse, toutes ces nouvelles civilisations complexes finissent par se perdre dans les mondes parallèles virtuels et immersifs des metaverses bien plus faciles et rapide à créer.
Si les extraterrestres ont abandonné la conquête spatiale au profit de la réalité virtuelle, nous n'aurons jamais de leurs nouvelles.
Cela pourrait être une des solutions au paradoxe de Fermi.

Ils sont là à l'extérieur de notre caverne

Image : L’allégorie de la caverne est une représentation métaphorique de l'ignorance qui caractérise la condition humaine.  L'allégorie met en scène des hommes enchainés et immobilisés dans une caverne depuis leur naissance. Ils tournent le dos à l'entrée et n'ont jamais vu d'objets réels, ils n'ont vu que les ombres des objets projetées sur la paroi de la caverne.

Les extraterrestres sont déjà là mais nous ne les voyons pas !
Avec seulement un million d'années d'avance une civilisation extraterrestre pourrait ne plus interférer avec la matière. S'ils n'utilisent plus les ondes électromagnétiques, nous ne pouvons pas sentir leur présence, leur technologie avancée les rendrait indiscernables.
Dans l'allégorie de la caverne, les personnages de Platon (427-347 av. J.C.) sont prisonniers de leur point de vue, ne voyant que les ombres des objets. Les prisonniers immobilisés et ne voyant pas l'entrée de la caverne, considèrent les ombres projetées comme les objets du réel. Du monde extérieur, ils n'en connaissent que la faible lueur qui parvient à pénétrer jusqu'à eux. La caverne de Platon représente le lieu de l'enfermement, de l'ignorance et des apparences.
Nous, les êtres humains, sommes tous conditionnés depuis l'enfance par notre environnement matériel qui se laisse percevoir par nos sens et s'intègre à nous comme une seconde peau.
Mais notre environnement terrestre nous oblige à vivre dans un monde vil, celui des besoins physiologiques et des conditions animales indispensables à la survie.
Comme les prisonniers de la caverne, nous vivons dans un monde sensible n'est peut-être qu'une falsification de la réalité.
Pour Platon la réalité matérielle et physique n'est pas la vraie réalité. Dans l'allégorie de la caverne il oppose le monde sensible au monde intelligible (le sens et l'intellect, l'ombre et la lumière). La caverne symbolise le monde sensible qui n'est qu'apparence.
Notre connaissance n'est pas assez aboutie et il est possible que comme les personnages de Platon nous ne voyons qu'une facette de la réalité. Peut-être devrions-nous coloniser notre espace intérieur et oublier les voyages interstellaires trop dispendieux.
Pour sortir de cet état d'ignorance et accéder à la connaissance, de nombreuses étapes intermédiaires seront nécessaires et le chemin sera très long.
Comme dans la caverne de Platon, nos yeux ne sont pas habitués à la lumière et de nombreux éblouissements seront indispensables pour atteindre la connaissance. Ce n'est qu'à ce moment là que nous pourront répondre au paradoxe de Fermi.
Sommes-nous seuls ou accompagnés !!!