⚡ Calculateur ou ordinateur quantique
Image : Dans la représentation géométrique d'un état quantique à deux niveaux, un qubit tel qu'un spin, peut être représenté par un point sur une sphère.
Dans cette sphère de Bloch, le premier qubit (qubit 0) est à l'état quantique 100% |1>, tandis que le deuxième qubit (qubit 1) est à l'état quantique 100% |0>.
Les points à la surface de la sphère correspondent aux états purs (décrit par un seul vecteur) du système, tandis que les points intérieurs correspondent aux états mixtes, 20% |0> + 80% |1> (décrit par sa matrice de densité avec des longueurs et des angles).
Crédit : IBM Quantum Computer.
Le qubit
A l'échelle microscopique, le calculateur quantique utilise les propriétés quantiques de la matière en particulier la superposition d'états.
Le calculateur quantique ou processeur quantique travaille sur des qubits dont les valeurs 0 et 1 (notation pour les états quantiques : |0> ou |1>) sont toutes superposées contrairement à l'ordinateur classique dont les valeurs sont soit 0 soit 1. En d'autres termes, avec un ordinateur classique 2 bits correspondent à 2 informations, avec un calculateur quantique 2 qubits correspondent à 4 informations où chaque information est probabiliste, 10% |00> + 25% |01> + 60% |10> + 5% |11>.
Donc 4 bits correspondent à 4 informations et 4 qubits à 16 informations probabilistes. A chaque fois qu'on rajoute 1 qubit on multiplie par 2 le nombre d'informations (2N) que l'ordinateur quantique peut traiter en même temps, il va donc 2N fois plus vite qu'un ordinateur classique.
N qubits représente une superposition de 2N états quantiques mélangés, ainsi la rapidité de traitement augmente de façon exponentielle avec le nombre de qubits (avec 20 qubits le facteur gain est de 1 million).
Une métaphore intéressante permet de comparer le calcul classique et le calcul quantique. Si l'on cherche dans une salle de 1000 personnes quelqu'un mesurant 1,80 m et parlant anglais, l'informatique classique doit interroger chaque participant un par un et en notant les réponses, ce qui va prendre un certain temps. Pour le calcul quantique, tout se passe comme si on lançait un appel général « Les personnes mesurant 1,80 m et parlant anglais peuvent-elles lever la main ? », la réponse est quasi instantanée. Dans ce cas là, le calcul est holistique et non plus séquentiel. <> Avec une puissance de 40 qubits, on pourrait atteindre la puissance du plus gros ordinateur existant en 2021 (Behold Summit d'IBM). L'intérêt d'un calculateur quantique est donc d'effectuer des calculs beaucoup plus rapidement !
Un calculateur quantique qui serait capable de manipuler 70 qubits (270 informations) de manière contrôlée, pourrait fournir un résultat immédiat sur 10 milliards de téraoctets d'informations.
Ce nombre est énorme, en effet chaque année sur internet les utilisateurs produisent environ 1 milliard de téraoctets d'informations.
Cette machine hyperpuissante doit fonctionner avec des algorithmes spécifiques (algorithme de Glover, de Shor, de Brassard, Høyer et Tapp, de Farhi, de Goldstone, de Gutmann, etc.). Ces algorithmes quantiques permettent de réaliser extrêmement rapidement certains calculs "très particuliers", aujourd'hui hors de portée d'un ordinateur classique.
Attention, l'ordinateur quantique ne permettra pas d'être plus rapide que l'ordinateur classique pour les applications grand public en tant que moteur de traitement de texte, de vidéo, de musique, etc.
Les ordinateurs quantiques beaucoup moins polyvalents ne seront donc pas utilisés comme les ordinateurs classiques, ils ne seront donc pas pour le grand public.
N. B. : Un qubit est le support physique de l'information quantique. C'est la version quantique d'un bit, et son état quantique peut prendre les valeurs |0>, |1>, ou la combinaison linéaire des deux, ce qui est un phénomène connu sous le nom de superposition.
Ordinateur quantique
Image : Flux consistant à soumettre un travail depuis un ordinateur classique vers un ordinateur quantique IBM. Une fois le travail exécuté le résultat de mesure quantique est renvoyé à l'ordinateur classique pour analyse et stockage.
Afin de minimiser les erreurs, en plus du blindage contre les radiations, le calculateur doit être plongé dans une cuve d'hélium liquide à une température proche du zéro absolu (-273°C).
Crédit image : Andi Sama
Ces dernières années, la plupart des activités de recherche sur l'ordinateur quantique se sont efforcées d'atteindre la suprématie quantique.
Malheureusement son développement depuis les années 1990 est d'une extrême complexité car le phénomène de décohérence (perte des effets quantiques en passant à l'échelle macroscopique) va à l'encontre de la réalisation physique des éléments de base : les qubits. Aujourd'hui encore, l'un des plus grands défis liés à la construction d'ordinateurs quantiques est de contrôler ou de supprimer la décohérence quantique.
De nombreux chercheurs ont exprimé leur scepticisme quant à la possibilité de construire des ordinateurs quantiques évolutifs, généralement en raison du problème du maintien de la cohérence à grande échelle.
En 1998, IBM présente un calculateur quantique de 2 qubits, 5 qubits en 2000 puis en 2017 des systèmes équipés de 16 qubits. En 2017, IBM fait fonctionner un calculateur à 50 qubits pendant 90 microsecondes atteignant le seuil théorique de la suprématie quantique.
En 2019, Google a fabriqué Sycamore, un processeur quantique de 53 qubits dont la puissance supposée est de 10 mille milliards d'états quantiques superposés.
Google aurait atteint la suprématie quantique !
L'article publié par Google le 23 octobre 2019 dans la revue scientifique Nature, montre que pour la première fois depuis les années 1990, le calcul quantique est possible. Cet article a été soumis à un travail d'évaluation par des chercheurs extérieurs. IBM en compétition avec Google a fait paraitre un article disant que le calcul qui prendrait 10000 ans d'après Google avec un ordinateur classique, serait faisable en seulement 3 jours avec un autre algorithme et en augmentant la mémoire RAM à 250 millions de Go.
Le calculateur quantique est très vulnérable aux erreurs sur les qubits, ce qui nécessite des codes correcteurs d'erreurs très sophistiqués. Pour minimiser les erreurs, en plus du blindage contre les radiations, le calculateur doit être plongé dans une cuve d'hélium liquide à une température proche du zéro absolu (-273°C).
En effet, il doit être totalement isolé du monde extérieur pendant la phase de calcul car il ne doit pas interagir avec d'autres objets quantiques.
Plus le système comporte de qubits et plus la durée pendant laquelle il reste cohérent décroit, elle décroit même exponentiellement. Au delà d'un certain nombre d'atomes, la durée est nulle.
En conclusion, les ordinateurs quantiques ne seront probablement pas dédiés à des applications grand public mais plutôt à des calculs analytiques (marchés financiers, modèles climatiques, simulations de physique des particules, vision intelligente, modélisation de molécules, recherche dans des bases de données gigantesques, cryptographie, etc.). De plus ils seront couplés avec des ordinateurs classiques afin d'être controlés.
N. B. : La suprématie quantique (terme introduit par le physicien John Preskill) désigne le nombre de qubits au-delà duquel plus aucun superordinateur classique n'est capable d'atteindre la puissance de calcul d'un ordinateur quantique. Un superordinateur peut atteindre la puissance de calcul d'un ordinateur quantique de 40 qubits, mais à partir de 50 qubits cela devient physiquement impossible, la durée du calcul serait inacceptable (des milliers d'années).